REGARDS D’AUJOURD’HUI SUR LE NAZISME D’HIER

Thème : HISTOIRE ET GEOGRAPHIE                                                                                                                                   Mardi 27 Novembre 2007

Regards d’aujourd’hui sur le nazisme d’hier

Par  Jean-Claude Netter

Tout commence le 20 avril 1889. Dans le foyer d’Alois Hitler et de Klara Pölzl naît, à Braunau am Inn, en Autriche, le petit Adolf. On ignore alors que ce petit bébé deviendra le plus grand assassin de tous les temps.

Bien que n’étant pas diplômé, son père s’élève à force de travail à un rang assez élevé dans l’administration en étant nommé Contrôleur général des Douanes à Linz. Homme sévère, il rudoie Adolf, élève assez médiocre qui se distingue en histoire et géographie mais qui montre de grosses lacunes en maths/physique. Adolf déteste son père mais adore sa mère, femme simple d’origine paysanne, au regard émouvant. Elle meurt en 1907 d’un cancer du sein, quatre ans seulement après son époux. Cette année-là, Adolf est à Vienne car il veut intégrer les Beaux-Arts. Il se voit comme un grand peintre. Mais échoue à deux reprises au concours d’entrée, en 1907 et 1908. Désoeuvré, il vit assez misérablement dans cette capitale cosmopolite de l’empire Austro-Hongrois. Il loue pendant quelques mois une petite chambre avec August Kubizek, subsistant avec sa petite pension d’orphelin et des petits travaux de manœuvre. Kubizek écrira plus tard que Hitler était un homme terne,  qui lisait peu (uniquement des manuels militaires) mais qui avait une passion pour les opéras de Wagner. Il assista treize fois à « Rienzi », l’histoire d’un révolutionnaire qui prend le pouvoir à Rome, qui lui rend sa force d’antan, avant de voir le peuple se retourner contre lui. A la sortie  d’une des représentations, Hitler dit à son colocataire : « Voilà ce que je serai ».

Hitler, chef de parti

Arrive le moment où il doit être incorporé dans l’armée. Refusé de l’armée austro-hongroise, il réussit à incorporer, en 1914, le 16e régiment de marche bavarois de l’armée allemande. Il fait une guerre courageuse, est distingué de la croix de fer 2e classe, devient caporal puis obtient la croix de fer 1re  classe (rarement accordée aux non officiers). Dans les derniers mois de la guerre, son bataillon est victime d’une attaque au gaz moutarde et Adolf perd la vue pendant quelques jours. C’est sur son lit d’hôpital qu’Hitler apprend que la toute nouvelle République (qui a pris le pouvoir après l’abdication de Guillaume II) vient de signer l’armistice. Le caporal Hitler vitupère auprès de ses camarades contre ce pouvoir qui a subi un diktat alors que l’Allemagne aurait dû, selon lui, être désignée comme vainqueur de la guerre. Déjà, Hitler savait dire aux gens ce qu’ils voulaient entendre. Remarqué par son capitaine (qu’il a sauvé), Hitler est employé comme officier politique pour infiltrer et dépister les communistes. Il devient militant et s’engage lui-même dans un groupuscule nationaliste. Il fréquente aussi la société de Thulé, une société secrète antirépublicaine, antisémite, paganiste, qui croit en une race de surhommes, les aryens. De futurs dignitaires du régime nazi (Goering, Himmler, Hess) en sont membres.

En 1920, il rebaptise son parti NSDAP (Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei, le Parti National-Socialiste des Travailleurs Allemands). Désigné comme le Führer (ou Guide) de son parti, il promet à ses auditeurs de réviser le traité de Versailles et de restaurer la fierté de l’Allemagne, prétendument mise à mal sous l’influence des Juifs cosmopolites. En 1921, lors de son premier congrès, le parti nazi ne compte que 3 000 membres. Quelques mois plus tard, il se dote de bataillons d’assaut (les SA) pour « protéger » les membres du parti dans leurs actions. Dans les années 1921/1923 ont lieu les premiers assassinats politiques, ceux d’un négociateur allemand de l’armistice et d’un ancien ministre socialiste des Affaires Etrangères.

Le 8 novembre 1923, Hitler et ses hommes mènent un coup de force pour prendre le pouvoir en Bavière. Le « putsch de la Brasserie » est un fiasco complet. La police et l’armée ne se sont pas ralliées aux nazis comme Hitler l’avait espéré, et seize de ses hommes ont été tués. Jugé pour conspiration, Hitler est condamné à cinq de forteresse, qu’il purge à Landsberg en compagnie de Rudolf Hess. C’est là qu’il écrit Mein Kampf, l’ « évangile » du nazisme. Le premier tome paraît en 1924, le second en 1925. Le succès est massif. Grâce à ses droits d’auteurs, Hitler vit désormais dans l’aisance.

Hitler, chef tout-puissant

Début 1932, Hitler, qui vient d’obtenir la nationalité allemande, mène campagne pour la Présidence de la République. Porté par la crise économique de 1929, son parti nazi un devenu l’un des plus populaires d’Allemagne. Hindenburg est néanmoins réélu au deuxième tour. En janvier 1933, Hitler est nommé Chancelier par le vieux maréchal sous la pression du chef de file de droite Frantz von Papen. Hitler convainc le Président d’organiser des élections législatives anticipées. Elles se déroulent en mars et confirment l’avènement des Nazis, qui obtiennent plus de 40% des voix. Entre-temps, l’incendie du Reichstag par un simple d’esprit hollandais a permis au gouvernement de limiter les libertés civiles et d’emprisonner des membres de l’opposition. Le 23 mars, le Reichstag accorde les pleins pouvoirs à Hitler qui créé, le 26 avril, la Gestapo, la plus terrible police de répression de l’Histoire (avec le KGB). Les partis d’opposition et les syndicats sont progressivement interdits. A la mort du président Hindenburg, le 2 août 1934, Hitler se fait nommer Président Chancelier Chef du Parti Nazi. Il a tous les pouvoirs. Les opposants politiques sont envoyés à Dachau, premier camp de concentration du IIIe Reich.

C’est en 1935 que débute la chasse aux juifs. Les lois de Nuremberg stipulent que « ne peut être citoyen allemand que celui qui a du sang allemand ». Cette chasse se fera en trois étapes : vous n’avez pas le droit de vivre comme nous, vous n’avez pas le droit de vivre avec nous, vous n’avez pas le droit de vivre. En 1938, lors de la « Nuit de cristal », des pogroms dans toute l’Allemagne se traduisent par des meurtres, viols, de centaines de juifs et par la destruction de très nombreuses synagogues. La même année, Hitler a fait l’Anschluss et obtenu le rattachement de l’Autriche au IIIe Reich. La crise se déplace vers les Sudètes, territoire germanophone de Tchécoslovaquie que Hitler veut annexer. La guerre frappe à nouveau à la porte de l’Europe. Mais, au grand soulagement des populations anglaise et française, résolument pacifistes, les accords de Munich permettent d’éviter le conflit, en échange de l’annexion des Sudètes par l’Allemagne.

Hitler, chef de guerre

Moins d’un an plus tard, le conflit éclate tout de même. Suite à l’attaque de l’Allemagne contre la Pologne, la France et l’Angleterre déclarent la guerre à l’Allemagne en septembre 1939. Hitler devient chef de guerre. Neuf mois plus tard, il est au sommet de sa gloire. Ses troupes viennent de vaincre l’armée française et le maréchal Pétain a signé l’armistice. Les Allemands adulent Hitler comme un Dieu, qui leur a rendu leur honneur après l’humiliation de 1918. Lui-même se voit comme un envoyé de la Providence.

Le 22 juin 1941, Hitler rompt le pacte de non-agression qui liait l’Allemagne et l’URSS depuis août 1939, et attaque l’Union Soviétique. L’opération Barbarossa porte sur 2 000 Km de front et compte 2,5 millions de soldats. Hitler s’attend à une avancée rapide. Mais l’Armée Rouge résiste mieux que prévu. Quand l’armée allemande atteint Moscou, c’est déjà le début de l’hiver, un facteur négligé par Hitler. Mal équipées (elles sont toujours en tenues d’été), pas préparés, les troupes allemandes battent peu à peu retraite. Lors de bataille de Stalingrad, 200 000 soldats sont tués, 100 000 sont faits prisonniers (seuls 7 500 rentreront en Allemagne en 1957). A Koursk, les Allemands perdent 300 000 hommes. En un an, entre 1942 et 1943, l’armée allemande perd un million d’hommes sur le front russe.

Le 20 janvier 1942, alors qu’Hitler occupe encore presque toute l’Europe, se tient une réunion entre dignitaires nazis. Sous la direction de Heydrich (qui sera assassiné cinq mois plus tard par des résistants thèques), ils élaborent au cours de cette rencontre « très amicale, très chaleureuse » selon Eichmann, la solution finale. A partir de 1942, les Nazis pratiquent la « Shoah par balle » sur le Front de l’Est. Des commandos de SS, les Einsatzgruppen, exécutent sommairement deux millions de juifs, ainsi que 500 000 tziganes et des milliers d’homosexuels. Plus à l’Ouest, dans des camps d’extermination, environ trois millions de juifs sont gazés, dont un million uniquement à Auschwitz.

Pendant la guerre, Hitler partage son temps entre Berlin, son QG du repaire du loup (Pologne) et son nid d’aigle à Berchtesgaden. Il est plutôt paresseux, travaillant peu, se levant à midi, déjeunant vers 16 heures, dînant à minuit et se couchant vers 4 heures du matin. Ses ordres ne se discutent pas. Il les fait appliquer par deux ou trois sous-fifres qu’il met en concurrence. Fondamentalement, cet homme est un psychopathe. D’après des chercheurs, Hitler devait être atteint dune forme d’autisme de haut niveau, en ceci qu’il se comportait comme si l’autre n’existait pas. Il était incapable de manifester la moindre compassion, il n’a jamais rendu hommage à ses soldats, ses seuls signes d’affection se limitant aux tout jeunes enfants « que l’on peut encore façonner », disait-il. Albert Speer, pourtant un proche du Führer (« si j’avais eu un ami, il aurait été Speer » aurait-il dit), confiera dans les années 50 qu’Hitler était un homme démoniaque.  Incapable d’assumer ses responsabilités, le Führer se suicide dans son bunker quelques jours avant la fin de la guerre.

« Il est encore fécond le ventre d’où est sorti la bête immonde » écrivit Bertold Brecht dans les années 50. Cinquante ans plus tard, est-il possible de voir une résurgence du nazisme ? Il existe, certes, quelques groupuscules. Mais les conditions qui ont permis l’arrivée au pouvoir du parti nazi dans les années 30 ne sont plus réunies. Il s’était appuyé sur la crise économique et sur la soif de revanche après l’humiliation de 1918. L’extrême droite radicale avait alors trouvé une conjonction idéale entre cette crise et le charisme de cet homme. Autre différence majeure par rapport à 1933 : la démocratie allemande fonctionne aujourd’hui très bien.

Si l’on doit  trouver des velléités totalitaires, il faudrait se tourner davantage vers l’extrémisme islamique qui, à bien des égards, utilise une rhétorique qui n’est pas si éloignée de celle des Nazis en leur temps.

En savoir plus …

Coté livres :

PENSER LE NAZISME Eléments de discussion

Auteur : Thierry Feral
Éditeur : L’Harmattan

ISBN-10: 978-2-296-02852-4

http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=23505

Coté Web :

http://www.geostrategie.com/423/un-morceau-d%E2%80%99anthologie-%C2%ABla-frontiere-entre-islamisme-et-nazisme-est-mince%C2%BB

http://www.resistances.be/negat22.html

Histoire d’un film

http://lemondedetitus.blogs.letelegramme.com/archive/2007/01/08/la-chute.html

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