L’ÉNERGIE : BIEN LA CONNAITRE POUR MIEUX LA MAÎTRISER

Thèmes: Economie, Sciences                                                                                                                   Conférence du mardi 27 février 2024

L’ÉNERGIE : BIEN LA CONNAITRE POUR MIEUX LA MAÎTRISER

Par Jean-Marie RÉVEILLÉ, ancien ingénieur et expert acoustique au bureau d’études de Renault S.A., consultant en conception automobile.

INTRODUCTION

L’énergie est au cœur de notre vie : on l’utilise au quotidien et on en parle très régulièrement. On utilise de l’énergie en permanence : énergie que l’on puise dans notre alimentation, énergie pour notre vie moderne confortable (chauffage, voiture, électroménagers, transports, loisirs etc.), énergie dégagée par des phénomènes naturels (volcans …) etc.

Mais qu’est-ce que l’énergie ? Un fluide, des calories, des kilowatts ? En physique, l’énergie est une force en action caractérisant le changement d’un système physique.

La première forme d’énergie que l’on apprend à l’école est l’énergie mécanique, ou le Travail : E = F x D, c’est la force multipliée par le déplacement de cette force. La puissance sera le débit de l’énergie donc la force multipliée par la vitesse. Il faut de l’énergie pour faire des transformations mais il faut de la puissance si l’on veut le faire vite.

I – Bref historique.

L’histoire de l’homme a été substantiellement marquée par l’évolution des sources d’énergie qu’il a su ou pu utiliser. Jusqu’à il y a environ 500 000 ans, la seule énergie à la disposition de l’homme était sa propre énergie. En maîtrisant le feu pour chauffer, cuire, éclairer ou travailler les métaux, il a franchi la première marche de son apprentissage énergétique. Sont venues ensuite l’utilisation des énergies animales domestiquées, éolienne, puis thermique, électrique, nucléaire etc. Chacune de ces étapes a été l’occasion d’une évolution le plus souvent majeure des structures des sociétés humaines.

D’un point de vue scientifique, c’est le savant suisse Bernoulli (1700-1782) qui le premier parle d’énergie et du travail mécanique.

Il faudra cependant attendre le milieu du XIXe siècle pour clarifier les notions d’énergie, travail, intensité, puissance et force.

En chimie, la loi Lavoisier, établie grâce à l’aide de Madame Lavoisier, affirme qu’il y a conservation de la masse : 2H2 + O2 → 2(H2O) + chaleur. La chaleur ici ne pesant rien. Il y a conservation de la masse, comme il y a conservation de la charge électrique, de la quantité de mouvement, du moment cinétique, du nombre de nucléons etc. La caractéristique fondamentale pour un système isolé est que l’énergie se conserve. La conservation de l’énergie est une conséquence du fait que les lois de la nature ne changent pas avec le temps comme l’affirme le théorème de madame Emmy Noether (1882-1935).

On ne produit pas d’énergie, on ne consomme pas d’énergie, elle est là et ne change pas en quantité. On transforme l’énergie d’une forme en une autre. Au fur et à mesure des transformations, elle se dégrade. Il n’y a pas d’énergie renouvelable mais des sources d’énergie renouvelable. Quand la température devient trop basse, on ne peut plus la transformer.

L’énergie quantifie la capacité de transformation, la puissance quantifie le rythme de la transformation. L’énergie s’exprime en joules, symbole J. On trouve cependant plusieurs unités : 1 calorie = 4,18 joules ; 1 kcalorie = 4180 joules ; 1 kWh = 3 600 000 joules.

La chaleur pèse mais c’est indécelable. Ainsi, 4 g d’hydrogène (2H2) + 16 g d’oxygène (O2) ne font pas 20 g d’eau 2(H2O) mais 19, 999 999 997 g d’eau + 0,000 000 003 g de chaleur et on calcule cette dernière masse, non mesurable par Lavoisier, par la plus célèbre équation de la physique : E = m.C² formulée par Albert Einstein en 1905. Il y a donc conservation de l’énergie.

II – Les sources d’énergie

On distingue l’énergie externe qui provient du soleil ou de la lune et l’énergie interne qui se trouve sur la Terre.

L’énergie externe comprend l’énergie solaire (rayonnement) utilisée pour les centrales solaires (panneaux, four …) ou le chauffage de matériaux, des personnes et de certains animaux, qui produit les vents (éoliennes, voiles …), les pluies qui avec la gravitation universelle qui donne notre poids mais va provoquer les marées (barrages hydrauliques et centrales marémotrices).

L’énergie interne située dans le manteau et la croûte terrestre comprend les énergies fossiles (gaz, pétrole, charbon) pour les centrales thermiques ; divers matériaux (lithium, cobalt, manganèse, nickel, cuivre, fer, phosphore…) pour le stockage en batteries ; l’uranium pour les centrales nucléaire ; et les volcans pour les centrales géothermiques.

D’où vient l’énergie ? Au début de l’univers on ne sait pas ce qu’il y avait. Le Big Bang est simplement le moment à partir duquel on sait des choses et après le Big Bang, s’il existe, on peut juste dire qu’il y avait de l’énergie disponible pour produire les atomes puis plus tard les molécules dont nous sommes faits.

La photosynthèse est un bel exemple d’énergie bien utilisée. En effet, les plantes absorbent de l’énergie lumineuse gratuite et du dioxyde de carbone CO2, rejettent de l’oxygène O2 et fabriquent du sucre pour leur croissance… et la nôtre !

On passe facilement d’une énergie à une autre.  Ainsi on passe de l’énergie mécanique à l’électrique et vice versa grâce à un alternateur ou un moteur électrique. Grâce au moteur thermique ou au compresseur on passe de l’énergie thermique à l’énergie mécanique et vice versa. Autre exemple : on passe de l’énergie lumineuse à l’énergie électrique grâce aux cellules photoélectriques ou une lampe. Enfin on passe de l’énergie cinétique à l’énergie électrique et vice versa au moyen d’éoliennes ou de ventilateurs.

L’énergie nucléaire se divise en deux grandes catégories : l’énergie de fission et l’énergie de fusion.

En 1938 Lise Meitner et Otto Hahn réussissent à casser certains atomes en laboratoire et provoquent la fission nucléaire. En 1933, Leo Szilard imagine une réaction en chaîne de fission ce qui mènera à la fabrication des bombes d’Hiroshima et de Nagasaki en 1945. Ce procédé de fission est la technique utilisée dans nos centrales nucléaires. L’énergie de fusion qui elle fusionne des atomes légers permettra la bombe thermonucléaire beaucoup plus puissante ou on l’espère une source mieux contrôlée avec le réacteur expérimental Tokamak d’ITER International Thermonuclear Experimental Reactor de Cadarache en cours de montage.

La masse et l’énergie s’échangent et on peut créer de la masse à partir d’énergie pure.

Au moment d’opter pour une énergie, le choix est difficile car chaque type d’énergie a ses avantages et ses inconvénients. Ainsi l’énergie hydraulique est gratuite une fois le barrage et l’usine construite mais elle implique des déplacements de population, des dégradations de la biodiversité etc. L’énergie éolienne est elle aussi gratuite mais n’est disponible que par intermittence, elle engendre des nuisances sonores, perturbe la faune et dénature les paysages, etc. Les énergies fossiles sont quant à elles disponibles immédiatement mais s’épuisent et rejettent des gaz nocifs dont le dioxyde de carbone CO2.

III – Accès à l’énergie

Le développement humain est lié à l’accès à l’énergie tout comme la production car toute transformation s’accompagne de l’utilisation d’énergie. Par conséquent, plus on produit, plus on consomme d’énergie.

L’indice de développement humain, IDH, qui prend en compte le produit intérieur brut par habitant, PIB, le taux de scolarisation et l’espérance de vie montre qu’il est proportionnel à l’utilisation de l’énergie jusqu’à un niveau où cet indice ne progresse plus et où l’on peut commencer de parler de gaspillage.

Les machines sont des convertisseurs d’énergie pour nous aider. En 1820 on invente une machine vraiment puissante : la machine à vapeur de James Watt. En 1859 c’est l’invention du premier moteur à combustion par le prêtre ingénieur Eugenio Barsanti, puis c’est le moteur de Karl Benz qui apparaît. Enfin en 1887 Nikola Tesla met au point le premier moteur à courant alternatif.

Au cours des cent dernières années, la consommation de kWh par personne dans le monde a considérablement augmenté. En France, l’énergie nucléaire représente 72% de l’électricité produite mais elle ne représente pas toute l’énergie transformée puisque par ailleurs nous en utilisons d’autres formes principalement fossiles.

Le monde industriel est un monde de machines qui digèrent des carburants concentrés : charbon puis gaz et pétrole. On abandonne l’esclavage et le travail des enfants, du moins en Occident. Apparaissent les congés payés, les voyages, les loisirs, internet ce qui entraîne une véritable addiction aux énergies fossiles. Les machines ont décuplé nos forces, notre endurance, notre durée de vie et notre capacité de transformation et de consommation.

IV – Le stockage de l’énergie.

La nature a stocké pour nous. Ce « travail » de stockage nous le retrouvons sous forme de charbon, de bois, de gaz, d’uranium, de lithium, etc.

On stocke diverses sources d’énergie : le bois, l’huile, les sucres. Les batteries, les piles ou les supercondensateurs sont aussi des moyens de stockage. On stocke également l’air comprimé ou l’oxygène, l’hydrogène comprimé mais ce ne sont pas des sources primaires car il faut les fabriquer. On peut aussi stocker par changement de phase. L’énergie hydraulique se stocke et se transfère grâce aux barrages, comme le barrage de Grandmaison en Isère qui remonte de l’eau en altitude aux heures de basse consommation pour la stocker et l’utiliser mieux aux heures de pointes. On peut combiner avec du solaire ou des éoliennes comme aux Iles Canaries. Enfin, on peut stocker par chaleur sensible (sels fondus), stockage magnétique par anneau supra conducteur, par batteries électriques (site de San Diego aux Etats-Unis), par volant d’inertie (Joint European Torus en Grande Bretagne, par élévation de masses de béton comme en Chine.

V – Et chez nous ?

Notre confort moderne implique une multiplication de moteurs électriques : congélateur, lave-linge, télévision, sèche-cheveux, voiture … qui consomment déjà de l’énergie et produisent du CO2 pour être fabriqués et épuisent des matériaux plus ou moins rares et chers.

Dans un foyer, les plus grands postes de consommation électrique sont le chauffage (65%), les appareils électriques et l’éclairage (22%), l’eau chaude (11%) et la cuisson (7%). Les appareils qui consomment le plus sont ceux qui produisent du froid, viennent ensuite les appareils électroménagers et finalement l’éclairage.

La tendance est à la réduction de la consommation, on cherche donc l’efficacité énergétique par divers moyens : le progrès technique (une meilleure isolation, un meilleur rendement des machines etc.) mais aussi par la sobriété (chasse au gaspi des années 70, comportement responsable, électrification des usages etc.)

La pauvreté de certains ménages implique une sobriété subie (foyers qui ne peuvent pas se chauffer par exemple). Près d’un milliard de personnes ne disposent toujours pas d’électricité…

Auparavant on pensait que l’énergie était en quantité infinie alors que de nos jours on commence à comprendre qu’elle est en quantité limitée notamment les énergies fossiles mais on pense encore que le numérique est une source infinie. Cependant, le numérique est une nouvelle source de dépense énergétique forte et qui continue à augmenter. On cherche et on trouve des innovations qui permettent plus de sobriété. Ainsi on construit des centres de stockage numériques près des villes afin de récupérer la chaleur émise pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire des citadins.

CONCLUSION

L’histoire de l’humanité est étroitement liée aux capacités de l’Homme à utiliser l’énergie. Dans le domaine scientifique c’est à partir du XIXe siècle que des avancées très importantes ont lieu. Les sources d’énergie sont diverses bien que les énergies fossiles étant les plus faciles d’accès et d’utilisation sont les plus utilisées. La France reste le pays où la part du nucléaire est la plus importante mais chaque source comporte des avantages et des inconvénients rendant la transition énergétique complexe à mettre en place. La meilleure solution étant une baisse de consommation grâce à la sobriété collective et individuelle et les progrès technologiques.

 

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