L’ÉCOLE DE BALLET DE L’OPÉRA DE PARIS

Thèmes: Art, Danse                                                           Conférence du mardi 13 octobre 1992

L’ÉCOLE DE BALLET DE L’OPÉRA DE PARIS

 

 Par Claude Bessy

 

 

 

 

Mardi 13 octobre 1992, Claude Bessy, directrice de l’École de Ballet de Opéra de Paris est venue nous parler de cette école. Un film a été projeté et de nombreuses questions posées.

Historique —

L’École de Ballet de !’Opéra de Paris est la plus ancienne école de danse du monde occidental : la création en revient à Louis XIV dont le règne débute et s’achève par deux décisions importantes qui font de la danse un art souverain.

La première année de son règne personnel (1661), à l’instigation du cardinal Mazarin, Louis XIV accorde aux maîtres à danser le droit d’ouvrir l’Académie Royale de Danse qui est fondée avant l’Académie Royale de Musique (1669). Jean-Baptiste Lully en est l’homme-orchestre. Il impose à I’opéra naissant sa forme et ses règles. Lully n’oublie pas la danse : elle est toujours présente même dans ses tragédies lyriques. Il invente des « pas d’expression » et, quand il en est besoin, se met à danser devant ses danseurs pour leur faire comprendre ses idées.

Sous la direction de Pierre Beauchamp, le corps de ballet (à partir de 1672) devient de plus en plus habile, jusqu’au moment où, en 1681, il est possible pour la première fois de faire monter des danseuses sur une scène. Ce fut dans « Le Triomphe de l’Amour ». Auparavant, la danse donnée sur le théâtre était réservée aux hommes : les rôles féminins étaient assurés par des garçons travestis que le port du masque rendaient plausibles.

Devant la nécessité d’avoir des artistes complets capables de briller sur le théâtre, mais instruits également dans les autres arts présents au spectacle, le 11 janvier 1713, de par la volonté du Roi, l’initiative est prise de créer une École.

Cette école située rue Saint-Nicaise (rue traversant les Tuileries au niveau des actuels guichets du Louvre) est placée sous l’autorité du directeur de l’Académie Royale de Musique. L’enseignement en est confié aux maîtres de musique qui y exercent une fonction essentiellement artistique, mais ne possèdent aucun titre officiel au sein de l’École. Cette école a mauvaise réputation.

Le 17 mars 1780, Louis XVI modifiera profondément l’administration de l’Opéra. En effet, il retire à la Ville de Paris la gestion de l’Académie Royale et la place sous son autorité. La direction est confiée à un comité ou la danse est représentée par le Maître de Ballet et deux sujets du ballet. Dans les nouvelles directives, pour la première fois, un concours est organisé pour l’entrée des élèves de l’École dans le corps de ballet.

En 1805, un important changement survient : l’École est placée dorénavant sous la direction du Premier Maître de Ballet qui en a la pleine responsabilité pour son organisation, son fonctionnement ou sa pédagogie. Le privilège accordé au Premier Maître de Ballet subsistera jusqu’en 1860.

En 1806 est créée la Classe de Perfectionnement. L’ouverture d’une classe supérieure laisserait supposer que l’École a atteint un très haut niveau. La fin des études est sanctionnée par un diplôme ou certificat. En fait à l’École, le meilleur et le pire se côtoient. Peu de sujets brillants s’en dégageront. La médiocrité de certains d’entre eux amène à préciser l’origine de !’appellation des « petits-rats ». Selon un document de 1836 :

« De l’espèce dégénérée des rebuts de l’École, les rats, quand leur figure et leur soumission les recommandent assez pour qu’on les laisse figurer comme remplacement des titulaires à 20 sols par représentation .. ».

Un autre document du 19ème siècle évoque la triste condition des élèves :

« Le rat est élève de l’École du Ballet, et c’est peut-être parce qu’il est enfant de la maison, parce qu’il y vit, qu’il y grignote, y jabotte, y clapotte, parce qu’il ronge et égratigne les décorations, éraille et troue les costumes, cause une foule de dommages inconnus, et commet une foule d’actions malfaisantes, occultes et nocturnes qu’il a reçu ce nom passablement incroyable de « rat ». Le rat est tout jeune, mal nourri, sec et noir comme un petit être qui se chauffe à la fumée des quinquets ».

En 1842, une heureuse disposition est prise. Les danseurs mis la retraite sont autorisés, sans perdre leur pension de danseurs de l’Académie, à donner des cours.

En 1860, un nouveau règlement confie désormais les destinées de l’École au directeur-administrateur général de l’Opéra.

L’École s’était installée depuis 1811 aux Menus-Plaisirs à l’angle de la Rue Richer et de la rue du Faubourg Poissonnière. En 1876, elle intégrera le Palais Garnier inauguré par Mac Mahon un an plus tôt.

Jules Ferry, rendant l’enseignement obligatoire avec la loi de 1882, oblige l’École de Ballet à observer cette nouvelle disposition. Elle n’est malheureusement pas toujours appliquée, mais à partir de 1919, le certificat d’études sera obligatoire pour entrer dans le ballet.

Le règlement de 1935 donne le profil du règlement actuellement en vigueur tant à l’École du Ballet que pour le Ballet de l’Opéra de Paris. Lycette Darsonval et Solange Schwartz seront les deux premières danseuses à obtenir officiellement le titre « d’Étoiles » en mai 1940. C’est depuis cette date qu’administrativement le titre « d’Étoile » figure dans les registres de l’Opéra.

En 1958, Lycette Darsonval sera la première femme à accéder à la place de directrice de l’École.

En 1963, le Ministère de l’Éducation Nationale, conscient des besoins de l’École, rend officielle la scolarité amenant les élèves au Brevet des Collèges, (et qui depuis, est devenu obligatoire pour l’entrée dans le corps de Ballet) et plus tard au baccalauréat.

Le 22 octobre 1972, la longue tradition de l’École de Ballet trouvera son aboutissement avec l’arrivée de Claude Bessy.

Claude Bessy –

Claude Bessy est entrée dans le Corps du Ballet de l’Opéra à treize ans, après avoir passé quatre ans à l’École de Danse.

Georges Balanchine lui donne l’occasion de danser en premier plan (« Le Palais de Cristal » et « Sérénade »). Serge Lifar, À son tour lui offre sa chance (« Septuor » et « Blanche-Neige »).

Nommée Première Danseuse à 19 ans, elle crée le rôle de l’Océanide dans « Les Noces Fantastiques » et danse en soliste dans « Le Chemin de Lumière » et  » La Belle Hélène ».

Promue Danseuse Étoile en 1956, elle aborde les grands rôles classiques (« Giselle », « Le Lac des Cygnes »). Victime d’un très grave accident de voiture, sa jambe brisée fait craindre la fin de sa carrière de danseuse, elle reparaît en scène quelques mois plus tard dans « Daphnis et Chloé.

Elle est la première ballerine de l’Opéra invitée à l’American Ballet Theatre à New York, elle danse au Bolchoï de Moscou, en Amérique latine et dans les grandes compagnies européennes.

Sa connaissance parfaite de la danse classique et de tout le répertoire, ainsi que des nouvelles disciplines chorégraphiques, la conduit à la direction de l’École de Danse en 1972.

 

L’École de Ballet de l’Opéra de Paris –

Claude Bessy n’a cessé de planifier et d’enrichir l’enseignement prodigué aux élèves et d’améliorer leur condition de vie en trouvant des arguments convaincants pour obtenir la construction de « École de Danse de Nanterre.

En 1985, Jack Lang pose la première pierre de l’École conçue par l’architecte Christophe de Portzampac. Elle sera inaugurée en 1987 par François Léotard.

L’édifice construit proche du RER, dans le Parc Malraux, est une réussite. Le grand escalier en formes de volutes asymétriques, dont chaque palier donne sur des mezzanines dominant les classes de danse, est déjà considéré comme un joyau architectural, au même titre que le grand escalier du Palais Garnier.

Les dimensions des nouveaux locaux permettent d’accueillir 180 élèves internes. L’enseignement général est dispensé sur place jusqu’au baccalauréat.

Le nouvel établissement comporte 10 studios, un amphithéâtre de 400 places et est doté d’un équipement vidéo ultra-moderne.

L’École assure également la préparation au professorat, une formation de recyclage pour les danseurs professionnels et peut recevoir des boursiers étrangers.

Claude Bessy obtient du nouvel Administrateur Général de l’Opéra, Rolf Liebermann, que des modifications profondes puissent être prises en compte. Il s’agit de développer à la fois une scolarité poussée et un enseignement pluridisciplinaire de la danse.

Aux cours de danse classique sont adjointes d’autres matières : danse ancienne, danse folklorique et de caractère, solfège corporel, modern-jazz, mime, musique, histoire de la danse, ceci afin de former des artistes complets.

En passant du Palais Garnier à l’École de Nanterre, le lien n’a pas été rompu entre l’École et le Ballet de l’Opéra. Les démonstrations et les spectacles publics présentés depuis 1977 à la Salle Favart, au Théâtre des Champs-Elysées, au Grand Palais, et les tournées à l’étranger sont un antidote a la nostalgie des légendaires couloirs sombres et des salles de danse nichées sous les combles du Palais Garnier.

 

Les critères d’entrée à l’École sont sévères. Il faut avoir au minimum 9 ans et moins de 13 ans pour les filles, moins de 14 ans pour les garçons.

Claude Bessy ouvre l’École sur le monde. Les tournées au Japon et en France se feront à partir de 1981. Des professeurs de danse du monde entier visitent l’École dont la renommée est universellement reconnue, et qui aujourd’hui est considérée comme la meilleure École de danse du monde.

 

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