L’ART BYZANTIN

Thème : ARTS                                                                                                                                                                                       Mardi 7 Avril 2009

L’Art Byzantin

Par Louis Valensi – Ancien conservateur des Musées de France

L’Art byzantin forme, avec l’art roman et l’art gothique, l’une des trois principales formes d’art religieux du Moyen-Âge. A l’ombre de Sainte-Sophie, on peut se demander qui de Louis XIII ou de Voltaire a raison, le souverain qui apprend le grec ou le philosophe qui pourfend la décadence politique, morale et esthétique de Byzance ? Car, tout comme l’Empire byzantin est le prolongement politique de l’Empire romain, l’art byzantin se développe à partir de l’art romain, lui-même profondément influencé par l’art grec antique. Au Ve siècle, l’art et l’architecture de l’Empire romain d’Orient sont encore fortement imprégnés des canons romano-chrétiens.

C’est à partir du VIe siècle que l’on peut parler de naissance du style byzantin sous le règne de Justinien le Grand (527-565), grand bâtisseur et protecteur des arts. La cathédrale Sainte-Sophie, dont la vaste coupole culmine à 56 mètres, est élevée en son honneur.  Au XIe et XIIe, durant la période des Comnènes, la civilisation byzantine est en plein épanouissement. L’art et l’architecture byzantins dominent notamment la République de Venise et s’étendent à l’est de Danube. Cet art semble répétitif, sans imagination, mais cela est faux, il a au contraire inventé deux types d’églises chrétiennes : la basilique à coupoles, comme à Sainte-Sophie et l’église en croix grecque.

L’art byzantin se caractérise aussi par la représentation d’icônes, toujours frontales, comme des images figées et intemporelles. Il est très difficile de distinguer une mosaïque du XIe siècle d’un autre du XIXe siècle. Il existe toutefois un paradoxe inhérent à l’art chrétien : comment une foi dans un même dieu a pu engendrer trois formes d’art aussi différentes les unes des autres (byzantin, roman, gothique).

L’énigme d’un paradoxe

De part et d’autres de l’empire romain, d’Orient et d’Occident, on croit aux mêmes textes et on partage la même foi monothéiste, et pourtant on a abouti à des formes d’art extrêmement différentes. On peut expliquer ces divergences pour des raisons historiques et au rôle des invasions après l’éclatement de l’empire d’occident au Ve siècle. Les Ostrogoths s’installent en Italie. A Ravenne, le souverain, élevé à Constantinople, embellit et enrichit sa capitale. La basilique à charpente, ancien lieu polyvalent de réunions devenu chrétien, est surélevée de trois étages et ornée de mosaïques. Quand Justinien reconquiert cette partie de l’Italie pour cent ans,  cette basilique devient Sainte-Apollinaire. Mais l’Histoire fera dériver loin l’une de l’autre les deux parties d’une religion qui se voulait unitaire, ce qui aboutira à une divergence artistique.

La culture peut aussi expliquer cette différence entre l’art sacré et l’art byzantin. A l’origine, il existe une différence de langage, le latin contre le grec, et cette distinction entraînera une divergence plastique. Ainsi, les premiers conciles œcuméniques se déroulent dans les zones où l’on parle le grec. Vers l’an 400, la messe des Occidentaux se disait encore en grec mais le latin l’a finalement évincé à l’ouest. Pendant les croisades, l’incompréhension est totale entre l’est et l’ouest de l’empire. Les Seljukides s’emparent des trois quarts de l’empire de l’est et se trouvent à deux cent cinquante kilomètres de Constantinople. La première croisade est perdue en 1095 mais Byzance se considère comme victorieuse, ce qui a pour effet d’accentuer un peu plus la séparation culturelle entre les deux formes de chrétienté. De plus l’appréciation du sacré devait diverger. Il faudrait, pour s’en assurer, analyser la piété populaire dans la totalité de l’empire romain de langue grecque.

Troisième hypothèse : l’expression de la foi. A partir des Ve et VIe siècles, le fossé entre l’ouest et l’est commence à s’élargir, notamment en terme de mariolâtrie. C’est alors que naît à Byzance une théologie de l’icône entre 726 et 834 avec les iconoclastes, qui détruisent les œuvres d’art et les images humanisés de la religion. Il s’agit en fait d’un conflit impérial sur fond de la survie de l’art figuratif entre Léon III, qui décide de déterminer l’image du christ, et Constantin V, qui fait approuver par concile que les images ont une portée doctrinale. Contrairement à la tradition occidentale, les empereurs byzantins eux se donnent le droit de présider les conciles. C’est un siècle de déchirement pour Byzance, la crise est terrible. Elle débouche sur de pogroms, des déportations… Finalement l’orthodoxie triomphe, et s’impose dans les représentations religieuses. L’image ne doit servir qu’à l’expression de la piété.

Dans l’art byzantin, en dehors du christ, de la Vierge et des apôtres, seuls les empereurs peuvent être représentés. Ces personnages figurent sur un fond or d’une richesse stupéfiante qui donne un aspect dématérialisé. En revanche, en Occident, l’image a une valeur didactique, la peinture apprenant aux illettrés ce que la lecture apprend aux lettrés. Parallèlement, une autre différence capitale entre l’ouest et l’est se fait jour quant à l’évolution de la liturgie, passant d’une liturgie de procession à une liturgie d’apparition.

Contrairement à l’art gothique, l’art byzantin n’est pas dénommé par une justification esthétique. Les églises en croix grecque au volume plus serré et sans déambulatoire organisé, comme celle de Daphni, deviennent caractéristiques de l’architecture byzantine. Alors qu’en Occident, l’espace des lieux de cultes est de plus en plus ouvert et lumineux, avec des cathédrales de lumière (comme à Chartres, un vaisseau de clarté), en Orient l’espace est beaucoup plus fermé, les perspectives de rétrécissent. D’un côté on prie le Christ en croix et croit en une théologie de la souffrance, de l’autre on met en valeur le Christ pantocrator, le triomphateur, et la résurrection. L’esprit est différent. L’art byzantin, par sa capacité à hiérarchiser les personnages, sa débauche d’or, est art aussi riche voire même plus riche que le nôtre.

En savoir plus …

Coté livres :

L’Art byzantin
Auteur : Durand et Jannic
Éditeur : Pierre Terrail (7 avril 1999)

ISBN-10: 2702825834

http://www.amazon.fr/Art-byzantin-Durand/dp/2879392187

Coté Web :

http://www.memo.fr/article.asp?ID=MOY_BYZ_008

http://fr.encarta.msn.com/encyclopedia_761576529/byzantin_art.html

http://pagesperso-orange.fr/revue.shakti/byzantin.htm

http://www.lefigaro.fr/culture/2009/06/30/03004-20090630ARTFIG00001-l-art-byzantin-sort-de-l-ombre-.php

http://images.google.fr/images?hl=fr&q=art+byzantin&um=1&ie=UTF-8&ei=CpgqSt2tL82OjAe6lYz8Cg&sa=X&oi=image_result_group&resnum=4&ct=title

Une découverte iconographique et musique religieuse orthodoxe
http://www.wat.tv/video/art-byzantin-5ht9_8jza_.html

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