Thèmes: Civilisations, Histoire, Sciences, Conférence du mardi 7 octobre 2025
UNE BRÈVE HISTOIRE DE L’ASTRONOMIE
Par Monsieur Alain REDDING, chef du service astronomie et du planétarium du Palais de la découverte.
INTRODUCTION
L’astronomie, la plus ancienne de toutes les sciences, a débuté par l’observation à l’œil nu des corps célestes, essentielle pour l’agriculture et la navigation. Les civilisations antiques comme les Babyloniens et les Égyptiens ont développé les premiers systèmes astronomiques pour prédire certains phénomènes célestes.
Les Grecs, avec des savants comme Aristote et Ptolémée, ont élaboré le modèle géocentrique, plaçant la Terre au centre de l’univers, une vision dominante pendant plus de 1400 ans.
Durant l’âge d’or islamique, des savants comme Al-Battani et Al-Biruni ont raffiné les instruments et effectué des mesures précises, préservant et enrichissant le savoir grec, sans toutefois remettre en cause le géocentrisme.
La Révolution Copernicienne au XVIe siècle, avec Nicolas Copernic, a introduit le modèle héliocentrique, plaçant le Soleil au centre de notre système solaire. Galilée, grâce à l’observation du ciel avec une lunette astronomique, a apporté des avancées cruciales (phases de Vénus, Lunes de Jupiter) sur notre position dans le cosmos, tentant de démontrer tout au long de sa vie ce nouveau paradigme, et fut même condamné à l’exil lors de son procès pour avoir défendu le modèle héliocentrique proposé par Nicolas Copernic.
Puis Johannes Kepler a formulé les lois des mouvements planétaires, avant qu’Isaac Newton unifie la mécanique céleste et terrestre avec sa loi de la gravitation universelle, expliquant pourquoi les planètes orbitent autour du Soleil.
Au XIXe siècle, l’invention de la spectroscopie a permis d’analyser la composition des étoiles et leurs caractéristiques.
Le XXe siècle a vu l’essor de la cosmologie moderne, avec la découverte de l’expansion de l’univers par Edwin Hubble, la théorie du Big Bang, et l’identification de la matière noire et de l’énergie sombre. Les télescopes spatiaux, comme Hubble et Webb, ont révolutionné notre compréhension de l’univers lointain. L’astronomie contemporaine explore désormais les exoplanètes, la formation des galaxies et les origines de l’univers, repoussant sans cesse les frontières de notre savoir.
I L’astronomie babylonienne et égyptienne.
Les débuts de l’astronomie à proprement parler commencent avec les Babyloniens et les Egyptiens. Ces peuples faisaient déjà la différence entre les planètes et les étoiles. On cherche également à mesurer le temps en créant l’ancêtre du cadran solaire : le gnomon. Les Sumériens bâtirent leur calendrier sur la structure des constellations. Grâce à l’assyriologue Sir Henry Rawlinson (1810-1895) qui a réussi à déchiffrer les tablettes babyloniennes (le site de Behistun en Iran actuel), nous savons que 5% des tablettes concernaient l’astronomie.
L’astronomie égyptienne établit le calendrier solaire de 365 jours pile et la division du jour en douze heures de jour et douze heures de nuit soit vingt-quatre heures. Dans le calendrier égyptien, Sirius joue un rôle important, son lever héliaque (lever d’un astre peu avant le lever du soleil) ayant été mis en parallèle avec la crue annuelle du Nil. Cependant, comme le calendrier ne comporte que 365 jours, on arrive à un retard d’un an tous les quatre ans environ, soit environ 100 jours – une saison- tous les 400 ans, par conséquent un grand décalage avec le calendrier agricole basé sur les crues du Nil. Par la suite les Egyptiens ont amélioré leur calendrier et notre calendrier grégorien actuel est basé sur un calendrier solaire.
II Dans l’Antiquité.
L’Antiquité est une période durant laquelle des progrès considérables sont réalisés.
Les Grecs savaient parfaitement que la Terre était ronde et ce grâce aux éclipses lunaires. En effet, à ce moment l’ombre de la Terre sur la Lune est ronde prouvant que notre planète est ronde.

Au IIIe siècle avant notre ère, le Grec Eratosthène (276-194 av. J-C) réussit à calculer la circonférence terrestre soit 6400 kilomètres, une valeur très proche de la distance réelle connue de nos jours. La taille de la Terre est calculée en mesurant la longueur de l’ombre portée d’un gnomon au même moment à midi par le Soleil à deux endroits différents, Alexandrie et Syène, villes dont on pouvait estimer la distance, en l’interprétant comme une différence de latitude le long d’un méridien de la sphère terrestre.
Les astronomes grecs essaient également de calculer la distance qui sépare la Terre de la Lune et du Soleil. Hipparque de Nicée (190-120 av. J-C) tente d’établir la distance entre la Terre et la Lune mais bien que le résultat soit proche de la réalité, ce chiffre est n’obtenu que suite à de nombreuses erreurs de calcul. Cependant Hipparque de Nicée réussit à déterminer avec précision les équinoxes. On doit également à ce savant le premier catalogue d’étoiles. Il perfectionne aussi certains instruments astronomiques ainsi en améliorant le théodolite il crée l’astrolabe.
Aristote (384-322 av. J-C) fait une synthèse de l’astronomie de son époque en établissant trois principes : le géocentrisme où la Terre est immobile et occupe le centre de l’Univers sphérique, la division du monde en deux régions : le Monde sublunaire où tout change et est corruptible et le Monde supralunaire rempli d’éther, monde parfait et immuable), et le fait que dans le Monde supralunaire les mouvements sont circulaires et uniformes.
A l’Antiquité on avait constaté le phénomène connu comme la rétrogradation de Mars. Mars se déplace d’Est en Ouest, elle semble stationner puis rétrograder ; c’est la boucle de la rétrogradation de Mars.
C’est Ptolémée (90-168) dans son œuvre l’Almageste qui réussira à expliquer ce phénomène. Ptolémée à partir d’observations uniquement à l’œil nu parvient à établir la position exacte du Soleil, de la Terre et de la Lune. En effet, à l’époque il existe des instruments de mesure (sphère armillaire, gnomon etc.) mais pas d’observation.
Par ailleurs, Ptolémée établira des tables astronomiques très élaborées.
A l’Antiquité et jusqu’au siècle des Lumières, l’astronomie sert à établir les horoscopes qui sont des aides pour les puissants au moment de prendre des décisions. Si les astronomes établissent treize constellations, les astrologues n’en retiendront que douze tout comme Ptolémée.
III La période médiévale.
Le VIIIe siècle marque les débuts d’une grande activité scientifique à Bagdad. Bien souvent les grands scientifiques, mathématiciens ou médecins, étaient astronomes à la Cour. Entre le IX et le XIe siècle on reprend les connaissances des savants grecs, c’est ainsi que l’on traduit en arabe l’ouvrage de Ptolémée qui gardera son nom Almageste en arabe. Cependant les astronomes arabes établissent un nouveau catalogue d’étoiles et perfectionnent certains instruments. Au IXe siècle le persan Al-Farghani (805-880) réussit à calculer l’obliquité de l’écliptique et Al-Kindi (801-873) écrit seize ouvrages d’astronomie.
Entre les XIe et XIVe siècle les astronomes arabes se détournent de plus en plus de l’astronomie de l’Antiquité et cherchent de nouveaux modèles. Ainsi Al-Tusi (1201-1274) établit le calendrier lunaire musulman qui sert entre autres à la détermination des heures de prière. Plusieurs observatoires astronomiques sont construits dont celui de Samarkand dont le grand arc d’un impressionnant sextant du XVème nous est parvenu jusqu’à aujourd’hui. C’est à Samarkand que fut déterminé l’axe de rotation de la Terre. En dépit de toutes ces avancées l’astronomie arabe souffre de l’absence de moyens techniques d’observation pour progresser et au XVIe siècle l’Occident fait un bond en avant grâce à des scientifiques comme Copernic, Galilée ou Kepler.
III La naissance de l’astronomie moderne en Europe.
Au XVIe siècle le polonais Nicolas Copernic (1473-1543) propose une nouvelle vision du monde : l’héliocentrisme, rejetant ainsi le modèle de Ptolémée. Le savant démontre mathématiquement qu’outre le mouvement des planètes, les phénomènes célestes sont tous correctement décrits avec un modèle héliocentrique. Sa théorie va révolutionner les sciences et offrir aux philosophes une autre idée de la place de l’Homme dans le cosmos. Les tables astronomiques établies à partir de la théorie copernicienne sont bien plus précises que celles basées sur le système de Ptolémée.
Le principal problème de la preuve de l’héliocentrisme est la parallaxe stellaire. Le danois Tycho Brahé (1546-1601) doute des conclusions de Copernic et en conclut que ce dernier s’est trompé. Brahé ne trouve pas la parallaxe stellaire, cet échec est dû au fait que l’on ne connaît pas la distance exacte des étoiles.
L’invention de la lunette astronomique au début du XVIIe siècle marque un tournant décisif pour l’astronomie. Ainsi au XVIIe siècle l’italien Galilée (1564-1630), un copernicien convaincu, est le premier à observer le ciel avec une lunette astronomique. En janvier 1610 Galilée démontre que tout ne tourne pas autour de la Terre.
Johan Kepler (1571-1630) est un excellent mathématicien mais peu intéressé par les observations. Il réussit cependant à obtenir les écrits des observations de Brahé. A partir de là, il définit trois lois fondamentales :
1 : les planètes décrivent un mouvement elliptique dont un foyer est occupé par le Soleil
2 : sur l’ellipse, les temps de déplacements sont égaux ;
3 : le cube a³ de la distance moyenne du Soleil divisé par le carré T² de la période de révolution d’une planète est une constante.
La conséquence fait que les saisons sont de durées inégales, avec un long été et un hiver court. 
Kepler établit également les tables dites Rudolphines en 1627, qui seront d’une précision inégalée jusqu’alors.
Afin d’éviter les problèmes avec l’Église, les astronomes se servent des frontispices pour faire passer leurs messages, comme Kepler à Ulm.
Gian Domenico (ou Jean-Dominique) Cassini (1625-1712) découvre la Grande Tache rouge de Jupiter en 1665 et la même année il détermine la vitesse de rotation de Jupiter, Mars et Vénus. En 1672 Richer et Cassini calculent la distance Terre – Soleil, soit 140 millions de kilomètres (valeur proche de celle établie de nos jours) grâce à la mesure de la parallaxe de Mars déduite des observations de Jean Richer (1630-1696) à Cayenne. Par ailleurs, Cassini fut le premier directeur de l’Observatoire de Paris fondé en 1667. Il est le premier d’une longue lignée de cartographes.
Les contributions d’Isaac Newton (1643-1727) sont considérables : il crée le télescope en 1668 et il définit les lois de la gravitation universelle, qui lui permet de préciser la 3ème loi de Kepler. Désormais on peut calculer les trajectoires d’orbite planétaire de manière très précise.
William Herschel (1738-1822) découvre Uranus en 1781 ainsi que les deux premiers satellites d’Uranus ; Uranus donnera le nom uranium à ce minerai découvert quelques après. Enhardis par le succès d’Herschel, les astronomes se mirent en chasse de nouvelles planètes et Urbain Le Verrier (1811-1877) découvre Neptune en 1846.
Les observations de scientifiques comme Léon Foucault (1819-1868) ou James Bradley (1693-1762) ont également été déterminantes : avec son pendule, Foucault apporte la preuve de la rotation de la Terre, et Bradley confirma expérimentalement la révolution de la Terre autour du Soleil.
IV XIXe et XXe siècles : les débuts de l’astronomie stellaire et naissance de l’astrophysique.
Au XIXe siècle, on découvre la lumière infrarouge et les raies d’absorption dans le spectre de la lumière solaire. Finalement en 1814 est inventé le spectroscope. Ces raies d’absorption reçoivent une interprétation physique qui est la base des méthodes de l’astrophysique.
C’est également au XIXe siècle que Friedrich Wilhelm Bessel (1784- 1846) établit l’année-lumière comme nouvelle unité de distance et qui l’utilise en 1838 pour calculer la distance de l’étoile binaire 61 Cygni. Il définit également la distance du parsec, c’est-à-dire la parallaxe par seconde d’arc.
Grâce à l’analyse des spectres, on établit que 90% des étoiles se composent d’hydrogène, et que des réactions de fusions nucléaires ont lieu au cœur des étoiles. On constate également que l’univers est en perpétuelle évolution. En effet, une étoile nait, atteint l’âge adulte puis évolue en toute fin de vie soit en supernova (explosion d’étoile supermassive pour les étoiles supérieures 8 masses solaires), soit en nébuleuse planétaire (pour les étoiles ayant une masse comprise entre 0 ,5 et 8 masses solaires).


Au XXe siècle l’Américain Harlow Shapley (1885-1972) est considéré comme le Copernic des temps modernes. En effet, il démontre le Soleil est excentré au sein de la Voie Lactée.
CONCLUSION
L’astronomie est une science en perpétuelle évolution, depuis l’antiquité. Observations et calculs établissent des modèles, que des observations ou calculs font évoluer, comme le passage du géocentrisme des origines à l’héliocentrisme de Copernic. Les évolutions des outils d’observation sont déterminantes, comme les télescopes spatiaux des dernières décennies. De nos jours, il a été recensé environ 300 milliards d’étoiles dans notre galaxie et on a observé quelque 6 000 exoplanètes. Par ailleurs, il existe autant de planètes que d’étoiles. Au vu de ces éléments on peut se demander si certaines planètes sont habitées ou même simplement abritent la vie.
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