SORTIE-VISITE : FONTAINEBLEAU​ ET BARBIZON

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Le jeudi 17 octobre 1985 140 membres du Cercle de Documentation et d’Information de Garches ont visité Fontainebleau.

Divisés en trois groupes, ils se sont tous retrouvés pour déjeuner au Restaurant de l’Hostellerie à Barbizon.

I.- LE CHÂTEAU.- (photo 1)

Photo 1

L’histoire des premiers siècles de Fontainebleau est mal connue.

Une charte de 1137 mentionne l’existence du château. C’est en 1517 que François 1er y vient pour la première fois  ; en 1526 il décide de refaire l’édifice. Toutes les constructions médiévales disparaissent, à l’exception du donjon de Saint-Louis. L’architecte français Gilles le Breton élève deux groupes de bâtiments reliés par la galerie François1er conforme au goût français de l’époque  : brique, pierre, ardoise.

Le roi fait appel à des artistes italiens pour la décoration. Dans le même temps on dessine des jardins. Tous ces artistes forment l’école de Fontainebleau. Henri II continue l’œuvre de son père  ; CharlesIX et HenriIII résident au château.

Sous le règne d’Henri IV, les travaux reprennent.

« Ici, à Fontainebleau, vous trouverez mon parc fermé, mon canal fort avancé, et plus de soixante mille arbres que j’ai fait planter cette année dans ledit parc, par boquetaux, presque tous repris, et avant cet hiver, j’espère y planter plus de cinq ou six mille fruitiers. J’ai fait nettoyer et curer tous mes canaux tant du jardin des canaux que autres. Mes palissades sont fort belles. J’ai déjà trois aires de hérons, qui me fait espérer que, puisqu’ils ont commencé, j’en aurai force autres dans cette année. Ma bassecour des cuisines sera plus de moitié faite, et l’aqueduc, que je fais faire, pour conduire les eaux et les amener dans le chasteau, fait de façon que j’en mettrai par tous mes jardins où je voudrai ».

De Fontainebleau, le 3e mai 1607 ​
​Henry.

Un groupe composé de Flamands et de Français poursuit les travaux de décoration dans un esprit différent, formant la seconde école de Fontainebleau.

Les règnes suivants agrandissent et transforment le palais.

Après la Révolution, qui épargne le domaine, Napoléon, qui préfère Fontainebleau à Versailles, aménage de nouveaux appartements, transforme la chambre à coucher des rois en salle du Trône, etc…

C’est dans la cour du Cheval-blanc qu’il fit ses adieux à la Garde, le 20 avril 1814.

Nous devons à Louis-Philippe une restauration souvent malheureuse, et à l’impératrice Eugénie, le Musée chinois. Des présidents de la République, seul Sadi Carnot y résida.

Transformé en musée, le palais fait depuis 1962 l’objet d’une minutieuse restauration qui a rendu au public la totalité des fresques italiennes.

Tel qu’il nous apparaît aujourd’hui, le château de Fontainebleau est un ensemble complexe qui s’articule autour de 6 cours.

À la sobriété de l’extérieur, s’oppose la richesse de la décoration intérieure qui, grâce à d’importants travaux effaçant les restaurations abusives du siècle dernier, a retrouvé sa fraîcheur.

Le château offre maintenant un exemple de l’art décoratif de la Renaissance et de ce qu’on a appelé « l’école de Fontainebleau ». Mais toutes les époques y ont laissé leur marque, et la visite est une rétrospective de l’histoire de l’art en France depuis François 1er.

C’est sous la conduite d’un guide que l’on parcourt la Galerie François 1er, la salle de bal éclairée par dix grandes baies, où une cheminée monumentale fait face à la tribune des musiciens. Par les appartements de Madame de Maintenon au mobilier Louis XIV, la salle des gardes, au plafond peint, on pénètre dans les appartements royaux. Le salon Saint-Louis rappelle l’ancien donjon. Le salon Louis XIII témoigne de l’art décoratif d’Henri IV  ; des tapisseries des Gobelins ornent le salon François 1er.

Photo 2

Les appartements de la reine ont conservé leur décoration du temps de Marie-Antoinette. La salle du Trône (photo 2), chambre du roi, d’Henri IV à Louis XVI, garde les apports des différents règnes. La salle du Conseil qui lui fait suite possède une décoration Louis XV.

En passant on peut admirer la galerie de Diane longue de 80m transformée au Second Empire en bibliothèque.

On termine la visite par la galerie des cerfs. Les murs sont ornés de peintures représentant de grandes demeures royales à l’époque d’Henri IV.

II.- LA FORÊT DE FONTAINEBLEAU.- 

En automne, les grandes futaies sont dans toute leur splendeur. Le soleil étant de la partie, les chênes, bouleaux et charmes offrent une véritable féérie de couleurs.

La forêt est divisée en 747 parcelles traitées en vue de fournir les plus beaux peuplements possibles.

Les 9 ∕ 10 de la forêt sont des futaies, le reste constitue des landes et des rochers.

Les aspects du sol.

Le relief actuel de la forêt est caractérisé par des alignements parallèles de rides gréseuses orientées Ouest-est.

Ces rides seraient l’héritage d’une période de climat tropical (ère tertiaire) durant laquelle des vents violents auraient amassé, dans cette partie du Bassin Parisien, une succession régulière de dunes de sable. Plus tard, la concrétion superficielle de ces sables « de Fontainebleau » en une gangue de grès dur, puis l’ensevelissement de l’ensemble sous les dépôts de calcaire de Beauce ont consolidé et conservé, dans ses grandes lignes, ce relief mamelonné.

Lorsque la table supérieure de calcaire de Beauce est épargnée par l’érosion, les versants des vallons se couronnent de monts.

Là où le calcaire a disparu, la carapace de grès apparaît  : ce sont les platières ou landes, plateaux rocheux, couverts de bruyères et d’arbrisseaux, souvent fissurés et parsemés de mares.

Quand les fentes et les trous sont nombreux dans cette table de grès, les eaux s’y glissent et déblaient la couche de sable sous-jacente. La table fissurée, privée de soutien, s’écroule, formant de pittoresques amoncellements rocheux  : ce sont les fameux rochers de Fontainebleau.

Quand l’érosion a balayé la table de grès et mis à nu le sable ou les marnes et calcaires de Brie sous-jacents on trouve des vallées ou des plaines dont l’altitude varie de 40 à 80 m. Des plantations de pins redonnent de la fécondité au sol et permettent ensuite la venue du hêtre qui, créateur d’humus, à son tour, cédera la place au chêne, l’arbre forestier par excellence.

III.- BARBIZON.- (plan p. 5).

Village situé à 10 km de Fontainebleau, Barbizon a été immortalisé par ses peintres paysagistes. Rousseau, Corot, Millet et bien d’autres, s’y étaient installés, fondant la fameuse « école de Barbizon ». On peut y visiter les ateliers d’artistes (transformés en musée).

Atelier de Millet et ​
son habitation
(1863)

L’atelier de Millet, vu du jardin

Atelier et Maison de Th. Rousseau

L’Auberge Ganne, que fréquentaient tous les artistes de l’École de Barbizon (en 1875)

Atelier Millet.-

J.F. Millet naquit le 4 octobre 1814 à Gruchy près de Cherbourg, d’une famille de cultivateurs aisés. Il fut élevé au milieu de ses sept frères et sœurs dans une atmosphère de haute vertu, d’humilité et de respect de Dieu.

Après des études avec Langlois (élève de Gros), il part pour Paris en janvier 1837 où il prépare le prix de Rome dans l’atelier Delaroche. N’étant pas sélectionné, il revient à Cherbourg où il exécute le portrait de l’ancien maire  : Monsieur Savain.

En 1845, il repart pour Paris.

Après avoir séjourné jusqu’en 1849 dans la Capitale, il se réfugie avec sa famille dans le hameau pour fuir l’épidémie de choléra et y retrouver d’autres peintres  : Th.Rousseau, Diaz, qui lui ont vanté la beauté de ce lieu. Ensemble, ils feront la gloire de Barbizon, où des noms célèbres viennent s’ajouter  : Dupré, Daubigny et bien d’autres.

Retiré dans le village de Barbizon, à la lisière de la forêt de Fontainebleau, tandis que son ami Rousseau allait écouter la confidence des vieux chênes, il dessinait ou peignait dans sa grange, en compagnie de souvenirs entretenus par la culture de son jardin et ses rêveries à travers champs. « Les figures de Millet résument en des attitudes simples, inoubliables, l’essentiel d’un travail d’une journée, d’une vie. L’homme se dresse isolé sur l’horizon vide  ; la silhouette sombre se détache sur le ciel lumineux. Le mouvement est si juste, si expressif que notre pensée le continue et c’est toute la vie du paysan qui se révèle en un éclair, le plus simplement du monde. Cet homme qui remet sa veste, le bras levé vers le ciel, sa journée est finie, la nuit arrive, il va rentrer au foyer. Cet autre qui s’arrête pour respirer un instant, l’œil hébété, les reins brisés, les deux bras pesant sur sa houe, n’est pour nous qu’une seconde de pause entre deux efforts. Cette femme qui verse l’eau tirée du puits dans le vase de cuivre, elle songe à la marmite qu’elle va mettre au feu pour le repas du soir. Tous ces gestes sont vrais, utiles, si étonnants de simplicité et de naturel que nul modèle ne les aurait trouvés s’il les avait cherchés. » (Génie de la France Louis Hourticq)

Millet a révélé la beauté plastique des gestes utiles, la puissance expressive de l’ouvrier manœuvrant son outil. Avec ses vêtements déformés par le travail, sa veste usée et ses sabots, le paysan rejoint le monde héroïque des figures de marbre, les dieux et les athlètes.

Parmi les œuvres les plus célèbres de Millet, on peut citer  :

– 1850  : le Semeur,​
– 1857  : l’Angélus,​
– 1863  : Départ au travail,​
– 1873  : série des Quatre Saisons.

Les membres du Cercle ont ensuite consacré quelques instants à la promenade dans l’unique rue du village. Les uns furent sensibles au charme de la pittoresque église, d’autres à l’atmosphère agreste du lieu. Mais de chaque pavé, de chaque pierre s’élève le souvenir des peintres dont le talent révéla au monde l’attrait de ce petit pays et les gestes ancestraux de ses paysans.

La fileuse

Le printemps

Départ au travail

Latondeuse

ANNEXE I

700 ANS À FONTAINEBLEAU OU LE CHÂTEAU DE TOUS LES ROIS

 Date Famille Souverains
 1150 Les Capétiens Louis VII y réside et lui donne sa 1ère notoriété.​
​Philippe-Auguste y fête à Noël 1191 son retour de la Croisade.​​
Saint-Louis y installe des religieux « Mathurins ».
 1150 Philippe-le-Bel y naquit et y mourut.
L’intermède dramatique de la Guerre de 100 ans.
 1525 Les Valois-Angoulême François 1er, le créateur du nouveau Fontainebleau. Après sa défaite (Pavie) et sa captivité (Madrid). Il fait décorer au goût italien sa nouvelle Grande Galerie. Complète la Biblio| thèque ancêtre de la Bibliothèque Nationale fondée par Louis XI. ​
Henri II  : le Roi entre 2 Dames, la Reine et Diane de Poitiers, l’inspiratrice.
Un second intermède sanglant : Les Guerres de Religion.
 1600 Les Bourbons Henri IV . avec François 1er c’est l’un des 2 grands créateurs de Fontainebleau  ; des artistes parisiens ou flamands succèdent aux italiens.
. les soins au Canal et au Parc (voir la lettre)​
Louis XIII : il y fut baptisé.
 1685 Louis XIV : dans les appartements de Madame de Maintenon a été préparée la « Révocation de l’Édit de Nantes » (Édit de Fontainebleau).
Louis XV : la Cour y passe l’automne  ; 900 chambres la mettent à l’aise.
Louis XVI
(Louis Philippe, Marie Amélie, la dernière reine à séjourner à Fontainebleau)
 1808 Les Bonaparte Napoléon 1er . Appartements de Joséphine puis de Marie-Louise.​
« voilà la vraie demeure des rois, la maison des siècles »
. Les appartements du Pape Pie VII « retenu » par Napoléon.
 1814 . La cour des Adieux  : du haut de l’escalier, i salue le drapeau de la Vieille Garde assemblée dans la cour.
Napoléon III . Eugénie de Montijo, la dernière de 8 souveraines 6 reines et 2 impératrices à séjourner dans « La Chambre de la Reine ».
 1870 . La Bibliothèque de 80 m. installée dans la Galerie commencée par Henri IV pour « La belle Gabrielle ».

ANNEXE II

1598  : Henri IV accorde la liberté de religion aux Protestants par l’Édit de Nantes.
17 octobre 1685  : Louis XIV revient sur cette décision par l’Édit de Fontainebleau.

Henri IV ayant convoqué en janvier 1599 au Louvre les principaux opposants de la Cour et du Parlement, leur tint ce discours  :

«  Vous me voyez en mon cabinet, où je viens parler à vous, non point en habit royal, comme mes prédécesseurs, ni avec la cape et l’épée, ni comme un prince qui vient parler aux ambassadeurs étrangers,mais vêtu comme un père de famille, en pourpoint, pour parler franchement à ses enfants. Ce que j’ai à vous dire est que je vous prie de vérifier l’édit que j’ai accordé à ceux de la Religion. Ce que j’en ai fait est pour le bien de la paix. Je l’ai faite au-dehors, je la veux au-dedans. Vous me devez obéir, quand il n’y aurait autre considération que de ma qualité et de l’obligation que m’ont tous mes sujets, et particulièrement vous tous de mon Parlement ».

En 1599, Henri IV écrivait au Pape  :

«  J’auray tel soing aussy à mesnager l’edict que j’ay faict pour la tranquillité de mon Royaume, que la religion catholique en reçoive le principal et plus asseuré fruict, comme elle a bien commencé, ainsy que aura représenté à Vostre Saincteté mon dict ambassadeur, la suppliant de ne s’arrester aux advis qui luy pourroient estre donnez du contraire  ; car, en vérité, ils procèdent de personnes poussées de faction plustost que de religion, comme Vostre Saincteté cognoistra tous les jours davantage par ce qui s’ensuivra ».

Mais 100 ans plus tard  :

La Marquise de Sévigné écrivait à propos de l’Édit de Fontainebleau, révoquant l’Édit de Nantes  :

«  Vous avez vu sans doute l’édit par lequel le roi révoque celui de Nantes. Rien n’est si beau que tout ce qu’il contient … »

Adieux de Fontainebleau, version 1985.

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