LA GRANDE AVENTURE DU RETOUR DE LA SEPULTURE DE NAPOLEON 1ER

Thème : HISTOIRE                                                                                                                                                                       Mardi 19 Octobre 2004

La grande aventure du retour de la sépulture de Napoléon 1er

Par M. Georges Poisson – Conservateur du patrimoine

A la fin du règne de Charles X, Napoléon Bonaparte fait l’objet d’un véritable culte populaire. Son effigie se retrouve un peu partout. Les deuils et la tyrannie sont oubliés au profit de la gloire. Dès 1830, de nombreux députés réclament le retour des cendres de Napoléon – qui n’a pas été incinéré – pour que les dernières volontés de l’Empereur soient respectées. « Je désire que mes cendres reposent à Paris au milieu de ceux que j’ai tant aimé » avait-il écrit dans son testament.

En 1836, Adolphe Thiers propose au nouveau roi de ramener le corps à Paris. Refus de Louis-Philippe pour qui ce retour aurait pour effet de rallumer des braises mal éteintes. En 1840, le roi accepte enfin, plutôt contraint, et prononce ces mots : « Monsieur Thiers, vous désirez faire revenir les restes de l’Empereur Napoléon, j’y consens. » La demande est rapidement acceptée par les autorités britanniques. A l’annonce de cette décision, une vague d’enthousiasme parcourt les rangs de l’Assemblée Nationale. Les députés votent un crédit d’un million de francs pour rapatrier la dépouille de Sainte-Hélène.

Les compagnons font partie de l’expédition

Le prince de Joinville est nommé à la tête de l’expédition. Tous les vieux compagnons de l’Empereur sont invités à l’accompagner dans ce voyage : le général Bertrand, accompagné de son fils Arthur né en exil à Sainte-Hélène, le général Gourgaud, ou encore Marchand, l’ancien valet de chambre de l’Empereur, et bien d’autres. Seul absent de marque, le général Montholon, pourtant premier exécuteur testamentaire de Napoléon 1er, qui s’est mis au service de Louis-Napoléon Bonaparte (le neveu). Le voyage dure trois mois à bord de la frégate La Belle Poule. La navigation dans l’Atlantique sud est longue et éprouvante. A mesure que La Belle Poule s’approche de Sainte-Hélène, l’ambiance est de plus en plus recueillie. Les compagnons se remémorent le voyage effectué 25 ans plus tôt en compagnie de Napoléon. Tous sont saisis d’une interrogation : « Dans quel état vont-ils retrouver ce corps ? ».

Le 8 octobre 1840, La Belle Poule amarre en rade de Jamestown, à Sainte-Hélène. Le lendemain, la délégation française monte l’escalier qu’emprunta Napoléon lors de son arrivée sur cette terre d’exil. Ce jour-là, le gouverneur de l’île leur fait cette annonce : « Messieurs, jeudi 15 octobre, les restes de l’Empereur Napoléon vous seront remis ». Pour la première fois, le gouverneur reconnaissait le titre d’Empereur à Napoléon, ce qu’il lui avait toujours refusé de son vivant. Douce revanche…

En route vers le cimetière, les compagnons de Napoléon remarquent que l’aspect du chemin a changé. Des pins ont été plantés, les moustiques ont disparu suite à l’assèchement des marais. La vie à Sainte-Hélène semble moins difficile qu’autrefois. La tombe de Napoléon se trouve sous une dalle sans nom où les fleurs se sont perpétuées. Les compagnons restent à méditer. Puis la mission se rend à Longwood, où vécut Napoléon. Tous sont choqués par l’aspect désolé de la maison et de ses alentours. C’est éperdu de tristesse que les compagnons regagnent la frégate.

Un corps parfaitement conservé

Le 14 octobre à minuit, la mission pénètre dans l’enclos de la tombe pour procéder à l’exhumation du corps de Napoléon. Les soldats du 91e régiment éclairent les ouvriers. Le dernier bivouac de l’Empereur a belle allure. A 9 h 30, la dalle est levée. Le cercueil en acajou n’a pas souffert. Douze fantassins le hissent et le placent sous une tente. A l’intérieur se trouve un cercueil en plomb, qui renferme un cercueil en fer blanc. Une fois le couvercle levé, les compagnons peuvent voir le corps. Prodigieusement intact, Napoléon semble dormir, son visage a conservé son aspect serein. L’Empereur, comme au lendemain de sa mort, semble jeune – beaucoup plus que ses anciens compagnons marqués par l’âge.

Une fois les trois cercueils refermés et remis dans la grande bière d’acajou venue de France, il faudra 42 hommes pour porter cette masse de 1 200 kg. Quand la procession arrive au débarcadère, à 17 h 30, Joinville les attend. Une chaloupe chargée à couler transporte le cercueil à la frégate. Et, à 18 heures, Napoléon quitte Sainte-Hélène vingt-cinq ans jour pour jour après y avoir abordé.

Quand La Belle Poule appareille, deux jours plus tard, les membres de la mission apprennent qu’une guerre contre la Grande-Bretagne est déclarée. Ils jettent à la mer tous les objets qu’ils ne veulent pas voir tomber entre les mains des Anglais. La frégate, rendue plus légère, arrive en avance en France. Le 30 novembre, elle accoste à Cherbourg. Le maréchal Soult, qui a remplacé Thiers pendant ce voyage, intime l’ordre à Joinville de rester huit jours supplémentaires dans le port de Cherbourg afin de mettre en place le rapatriement vers Paris. La solution fluviale est privilégiée car le convoi est ainsi plus facile à protéger que par route. Mais le bateau fluvial « Le Normandie » ne peut franchir Rouen et ses ponts. Un transfert doit donc être organisé en amont avec le bateau catafalque prévu à cet effet. Seulement ce « cercueil flottant » est en retard. La sépulture de Napoléon est donc placée à l’avant de « La Dorade », un petit bateau préparé pour l’occasion. Le bateau catafalque arrive enfin, mais trop tard pour organiser un nouveau transfert.

Une semaine extraordinaire

Tout au long du parcours de Rouen à Paris, les clochers sonnent au passage du convoi, la population s’incline, les vieux de la vieille sont au garde-à-vous et les grognards saluent leur Empereur. Le 14 décembre, le cercueil est débarqué le long d’une cale à Courbevoie. Soult, ancien aide de camp de Napoléon et nouveau président du Conseil reste prosterné très longtemps. Les grognards installent un bivouac pour veiller sur ce cercueil comme ils le faisaient autrefois autour de la tente.

De la journée historique du 15 décembre, Victor Hugo écrivit un magnifique reportage. Napoléon est d’abord conduit sous l’arc de triomphe, ce monument dont il ne vit jamais l’achèvement. Les cloches de Paris sonnent et tous ceux qui ont dévoué leur vie à l’Empereur sont là pour lui rendre hommage. Le cortège descend les Champs Elysées jusqu’à la Concorde, passe le pont de la Concorde puis arrive sur l’esplanade des Invalides où des milliers de personnes l’attendent. Le cercueil est amené à l’église des Invalides. Les funérailles se déroulent avec les plus grands noms de l’opéra et six cents choristes.

Napoléon sera sobrement inhumé dans son cercueil du panthéon en 1861. Il n’a jamais été ouvert depuis.

En savoir plus …

Coté Web :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Honneurs_rendus_%C3%A0_la_m%C3%A9moire_de_Napol%C3%A9on

http://ameliefr.club.fr/Retour2.html

http://www.histoire-empire.org/articles/aiglon/aiglon.htm

Le CDI ne peut être tenu responsable des dysfonctionnements des sites visités. Vous pouvez toutefois en aviser le Webmaster pour information et mise à jour