SI VERSAILLES M’ETAIT CONTEE, VERSAILLES VILLE NOUVELLE

Thème : HISTOIRE –  GEOGRAPHIE                                                                                                                                                 Mardi 7 octobre 2003

SI VERSAILLES M’ETAIT CONTEE, VERSAILLES VILLE NOUVELLE

par Maître André DAMIEN – Maire Honoraire de Versailles, Membre de l’Institut

Préambule : Versailles, « Ville nouvelle » avant la lettre

Le phénomène des villes nouvelles n’est pas lié au XXe siècle. Le premier exemple véritable est celui de la ville de Richelieu, créée par Armand du Plessis. Malgré les moyens déployés par le cardinal-duc, cette cité n’a jamais fonctionné.

La leçon aurait dû servir d’exemple à Louis XIV, mais tel ne fut pas le cas. Construite par le Roi Soleil, la ville de Versailles a été un échec permanent sur le plan urbain.

Versailles sous le règne de Louis XIV :

une ville créée de toute pièce

A l’origine de Versailles, se trouve le désir de Louis XIV de posséder un endroit au sein duquel on ait l’impression d’être dans le domaine privé du roi, où que puisse porter le regard.

Parmi les terres du gros bourg de Versailles, le souverain achète en quantité. Sur cet emplacement, et à la place du vieux rendez-vous de chasse de son père, Louis XIV construit un gigantesque château. Tout le reste est rasé.

Ayant détruit la ville, le roi crée le « Trident », trois avenues majestueuses qui vont rayonner à partir du château : l’avenue de Paris, l’avenue de Sceaux, et l’avenue de Saint-Cloud.

Afin de meubler cet ensemble, des constructions sont entreprises : la Grande et la Petite Ecuries, le Chenil du roi (à l’emplacement de l’actuel Palais de Justice), l’Hôtel du Grand Ecuyer (à l’emplacement de la mairie), et six grands hôtels (le long de la Place d’Armes).

La ville est raisonnable et bien bâtie. Pour arriver à cet ordre, Louis XIV entreprend des travaux gigantesques. Côté jardin, on creuse le Grand Canal et la Piazzo des Suisses. Côté ville, on coupe la butte Montbauron qui s’étale sur l’avenue de Paris.

Le problème est de peupler la ville. Pour ce faire, le roi y installe des ministères, contraint les grands seigneurs – déjà logés au château – d’acheter des hôtels pour leurs intendants et dispense les arrivants du paiement des impôts et du logement par « cré » (obligation de loger les troupes lors de leurs passages).

La ville atteint 30 000 habitants. Malgré cela, Versailles reste une cité artificielle.

La mort de Louis XIV est une catastrophe. Le Dauphin et la Cour s’en vont. La ville tombe à moins de 10 000 habitants.

Une prospérité nouvelle sous le règne de Louis XV

Avec le retour de Louis XV, Versailles renaît. Sa population remonte à 70 000 habitants, ce qui en fait une des premières villes du royaume.

Deux activités font essentiellement vivre la cité : le commerce et la spécialisation de certains en « intermédiaires en services ». Ces derniers cumulent les fonctions d’avocat, de conseiller juridique et d’expert comptable ; ils intercèdent auprès des grands pour leur demander l’obtention de récompenses honorifiques et de contrats. La ville de Versailles est donc en plein essor. Mais elle est mal tenue, car les rigoureuses prescriptions de construction ont été abandonnées.

Le règne de Louis XVI

C’est sous Louis XVI que l’on crée les premiers éclairages publics aux lanternes. Versailles en profite, mais ses rues, notamment la Place d’Armes, restent risquées. Dans son journal, le commissaire de police de l’époque décrit une ville agitée et désordonnée.

Le départ de la famille royale pour Paris, le 6 octobre 1789, marque une deuxième mort pour Versailles. La ville se vide à nouveau.

Après 1789

Un grand marasme s’empare de Versailles. La cité est dans un état effroyable. Les maires successifs essaient de réagir. Ne se contentant pas d’entretenir le château, ils mettent en place des administrations qui rapportent : une préfecture, un évêché, un lycée, de nombreuses écoles et un grand séminaire.

Louis-Philippe fait de Versailles un lieu « touristique »

La rénovation du château par Louis-Philippe et son ouverture au public apportent à la ville une population inouïe de touristes. Ceux-ci vont devenir la proie des Versaillais, qui leur font payer des sommes folles.

Sous Napoléon III

Napoléon III crée deux champs de courses à Versailles : l’un à Porchefontaine, l’autre à Satory.

Ces lieux apportent à la ville une certaine prospérité. Mais les Versaillais ne sont pas habiles à rentabiliser cette manne.

Du XXe siècle à nos jours

Au tournant du siècle, les anciennes habitations menacées d’effondrement sont reconstruites dans le style 1880-1900

Un quartier survit : Saint-Louis. Né sous Louis XIV, il est encore en assez bon état. Toutes ses maisons auraient dû commencer à s’effondrer vers les années 1950-1960, mais cette époque a correspondu aux débuts de la protection du patrimoine.

Les années 1950-1960 voient également l’apparition de deux phénomènes :

– la ville de banlieue : les petits villages hors des grandes villes commencent à devenir de petits centres d’attraction. A Versailles, on s’empare du quartier de Montreuil qui devient typique des villes de banlieue chic.

– L’urbanisation des fortifs : des sans-abri viennent s’installer dans des petites baraques en planches. L’exemple versaillais est Porchefontaine. Aujourd’hui, c’est le quartier des jeunes énarques, pas encore assez riches pour s’offrir le centre de Versailles.

Conclusion :

Dans son évolution urbaine, Versailles a subi différents types d’urbanisation :

– l’urbanisation volontaire, autoritaire avec Louis XIV,

– l’urbanisation fantaisiste, à partir de Louis XV,

– l’urbanisation administrative, après la Révolution,

– l’urbanisation de la banlieue et des fortifs au XXe siècle.

Aujourd’hui, la ville est relativement prospère. Mais elle reste un casse-tête permanent pour ses édiles.

En savoir plus …

Coté Livres :

Versailles triomphant, une journée de Louis XIV,

Béatrix Saule,

Flammarion, 1996,

ISBN 208-012352-1

Jardins et jardiniers de Versailles au Grand Siècle

Dominique Garrigues

Champ Vallon, 2001.

Les Demeures du Soleil : Louis XIV, Louvois et la surintendance des Bâtiments du roi,

Thierry Sarmant,

Champ Vallon, 2003.

Le prince Louis cardinal de Rohan-Guéméné ou les diamants du roi.

Jean-Claude Fauveau,

L’Harmattan, 2007.

Versailles. Le pouvoir de la pierre

Joël Cornette (dir.),

Tallandier, 2006.

Coté Web :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2teau_de_Versailles

http://www.chateauversailles.fr/

http://crcv.revues.org/

http://maps.google.com/maps?ll=48.809520,2.105169&spn=0.025722,0.050473&t=k&hl=fr

http://www.du-ciel.com/wordpress/v/voyages/versailles/

http://www.grandparcdeversailles.org/

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