VAUBAN, bâtisseur du Roi Soleil

Thème : HISTOIRE ET GEOGRAPHIE                                                                                                                                   Mardi 29 Janvier 2008

VAUBAN, bâtisseur du Roi Soleil

Par Sébastien MARECHAL – Conférencier

En 2007, on commémorait le tricentenaire du décès de Sébastien Le Prestre de Vauban (1633-1707) qui n’était pas qu’un grand bâtisseur. Il était aussi un grand humaniste. Vauban naît à  Saint-Léger-de-Foucherets (aujourd’hui Saint-Léger-Vauban) dans une famille de la petite noblesse désargentée. S’étant tourné vers la carrière militaire, il rejoint les troupes du Grand Condé au moment de la Fronde (1648-1652) contre les troupes du jeune roi Louis XIV qui n’a alors que dix ans. Ce n’est pas par choix politique qu’il combat auprès du chef du parti frondeur mais davantage par « solidarité régionale ». Fait prisonnier début 1653, Vauban est interrogé par Mazarin, qui a remarqué son sens tactique. Le conseiller du roi  n’a aucun mal à convaincre le jeune officier de se mettre au service du monarque. Et, en 1655, Vauban obtient son brevet d’ingénieur du roi.

A l’époque, l’architecture militaire est encore en partie héritée du Moyen-Âge. La cité de Carcassonne, construite au cours des 13e et 14e siècles, est caractéristique de ces cités médiévales protégées par des remparts. Mais, avec l’apparition du boulet métallique, ces fortifications peu épaisses de 2,50 mètres d’épaisseur deviennent obsolètes. Pour faire face, les Espagnols construisent des fortifications dont les remparts font 25 mètres d’épaisseur, comme à Salses (Pyrénées-Orientales). Mieux encore, ils inventent les demi-lunes qui protègent des angles morts, un système que Vauban reprendra par la suite. Car, sans être un inventeur, Vauban saura perfectionner les systèmes existants.

De l’art de mener un siège

Tout au long de ses voyages pour le roi et les batailles menées – il participa à quarante-huit sièges en cinquante ans de carrière – Vauban se rend compte des failles que présentent les fortifications en France et à quel point il est nécessaire de renforcer la protection de nos frontières. Puisqu’il savait attaquer les places fortes, Vauban était aussi très bien placé pour savoir comment les défendre au mieux. En 1672, il rédige un mémoire sur la conduite d’un siège. Sa méthode est mise en pratique dès l’année suivante, en 1673, lors du siège de Maastricht, qu’il dirige. Vauban a compris que la façon traditionnelle de mener des sièges, de façon désordonnée, improvisée, qui faisait place à la vaillance plutôt qu’à la réflexion, qui négligeait d’attaquer aux endroits les plus vulnérables et de barrer l’accès à d’éventuels renforts, était à la fois coûteuse en hommes, en armes et en argent.

A Maastricht, Vauban fait construire deux lignes de tranchées en arrière (une ligne de circonvallation et une ligne de contrevallation) pour pouvoir se mettre à l’abri, mieux voir l’enceinte et bloquer l’accès pour les renforts. Ces lignes sont traversées par des tranchées diagonales, en zigzag (pour éviter l’effet d’enfilade). Vauban a l’idée d’utiliser une mine, creusée sous la fortification afin que l’explosion fasse le plus de dégâts possibles sur le rempart. Commencé le 13 juin, le siège de Maastricht s’achève le 26 par un succès de l’armée française. Devenue une armée de métier, celle-ci est aussi mieux entraînée et mieux formée. Dès lors, Vauban sera chargé de prendre le commandement des places fortes. Louis XIV lui fait entièrement confiance. Et, loin d’être un courtisan, Vauban ose lui parler franchement.

La France de Louis XIV a conquis de nouveaux territoires (les Flandres, l’Alsace, la Franche-Comté…) qu’il faut désormais protéger. La priorité est de sécuriser les frontières du royaume. On estime qu’au cours de sa carrière, Vauban a aménagé, construit ou réhabilité 180 fortifications, et donné son nom à un type d’architecture militaire, le système Vauban. Il imagine également le « pré carré » : chaque fortification fait désormais partie d’un réseau coordonné de défense en étant reliée aux fortifications voisines.

Les trois systèmes de défense Vauban

A l’issue de la guerre de Dévolution et l’annexion de Lille, Vauban va, pour la première fois, pouvoir mettre en pratique son système de bastion (qui est préféré au projet de son supérieur de l’époque, M. de Clerville). Pour des raisons politiques (une population tout juste « française ») et pratiques (tous les soldats, professionnels, sont hébergés ensemble, ce qui facilite les entraînements), la citadelle de Lille est construite à l’écart de la ville, sur un relief naturel. Elle est entourée d’eau, pour pouvoir noyer d’éventuels assaillants. Au milieu de la citadelle, on trouve la place d’armes, entourée d’un arsenal.

Vauban imagine ensuite un deuxième système défensif, qu’il met en œuvre à Besançon. Une première ligne de bastions est placée devant la ville basse tandis qu’un deuxième bastion est situé devant la citadelle, bâtie en hauteur.

A Neuf-Brisach, ville ex-nihilo, bâtie de toute pièce sur d’anciens champs pour protéger le Rhin, Vauban met en place son troisième type de système de défense.  Cette fois, il n’a pas à se soucier d’édifices existants et peut faire comme bon lui semble. Cette ville nouvelle, construite autour de la traditionnelle place d’armes, conserve son système de bastions et de demi-lunes, mais voit son système de fortifications doubler. Près de deux siècles plus tard, en 1870, Neuf-Brisach résistera à un siège d’un mois, alors même que les moyens militaires ont fortement progressé.

Vauban applique également son système de défense aux villes portuaires (Brest, Toulon, Dunkerque, Saint-Martin-de-Ré). Son sens de l’anticipation fait des merveilles en 1694 quand l’armée française repousse un débarquement des Anglais à Camaret, venus pour prendre le contrôle de la rade de Brest.

Les préoccupations sociales de Vauban, inventeur de la dîme royale

Grâce à ses déplacements dans le royaume (180 00 kms parcourus dans toute sa carrière), Vauban découvre la réalité quotidienne des Français, de plus en plus démunis, qui subissent un système fiscal très injuste. Les guerres de Louis XIV coûtent cher. En cette fin de XVIIe siècle, les caisses de l’Etat sont vides. Vauban présente alors une solution « révolutionnaire » : la dîme royale. Cet impôt « démocratique » doit être acquitté par tout le monde, y compris le clergé et la noblesse qui en sont jusque là exemptés. Chacun (sauf le roi) devra verser au royaume un dixième de ses revenus. En 1707, Vauban fait imprimer son projet sans l’autorisation du roi. La sanction est immédiate : l’ouvrage est immédiatement retiré. Eu égard à son titre de Maréchal (acquis en 1700), Vauban échappe à la disgrâce mais, quand il meurt quelques semaines plus tard, le roi ne lui rend pas les hommages qui auraient dû lui échoir.

On le sait moins, Vauban avait rédigé plusieurs traités sur l’eau. Il s’est toujours intéressé au transport maritime et fluvial, dont il s’est servi pour ses constructions. Pour approvisionner Versailles en eau, il préconise de construire des canalisations souterraines et d’utiliser la pente naturelle. Mais Louis XIV préfère la majesté des aqueducs. Finalement, Vauban construira l’aqueduc de Maintenon sur ordre du roi (pour détourner l’Eure) et bâtira un réseau de canalisations (qui existent toujours) sur une partie du parcours. Vauban a également participé à la construction du canal du midi.

Ayant gagné beaucoup d’argent durant sa carrière, Vauban prend une revanche sur ses origines en rachetant le domaine des Bazoches que son arrière grand-père avait dû vendre. Il y fait construire une écurie pouvant accueillir 160 chevaux. C’est de là que partaient les ordres de Vauban aux quatre coins du royaume, à destination des directeurs qu’il avait nommés sur chaque chantier. C’est sur ce domaine qu’il est enterré. Pour saluer son génie militaire, Napoléon 1er fera transférer son cœur aux Invalides.

Parmi quatorze sites de Vauban, un va être classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Plus encore qu’au bâtisseur, c’est à l’artiste qu’on rend ainsi hommage, à un homme qui avait compris son époque et qui fut un précurseur du siècle des Lumières.

En savoir plus …

Coté livres :

Vauban, le Maître des Forteresses

Auteur : Luc Mary
Éditeur : L’Archipel

ISBN-10: 2841879194

http://www.amazon.fr/Vauban-Ma%C3%AEtre-Forteresses-Luc-Mary/dp/2841879194

Vauban, la pierre et la plume

Auteur : Michèle Virol, Victoria Sanger, Isabelle Warmoes, photos Pascal Lemaître
Éditeur : Editions Klopp

ISBN-10: 7828582293

http://www.amazon.fr/Vauban-pierre-plume-Mich%C3%A8le-Virol/dp/7828582293

Coté Web :

http://fr.wikipedia.org/wiki/S%C3%A9bastien_Le_Prestre_de_Vauban

http://www.cheminsdememoire.gouv.fr/vauban.html

http://www.vauban.asso.fr/index.htm

http://www.sites-vauban.org/

40 citadelles Vauban vues du ciel

http://www.linternaute.com/sortir/les-citadelles-vauban-vues-du-ciel/40-citadelles-vauban-vues-du-ciel.shtml

France 3 présente 78 vidéos pour près de 4 heures de reportages

http://search.ke.voila.fr/S/orange?rtype=kw&profil=orange&bhv=actu_video&rdata=vauban

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