LA MER PROPRE, reste-t-il de l’espoir ?

Thème : ECONOMIE – SOCIETE                                                                                                                                                     Mardi 19 Février 2008

La mer propre, reste-t-il de l’espoir ?

Par René de Cayeux

Comme l’air, l’eau est polluée. La faune et la flore maritime sont directement attaqués et peuvent aussi être en voie de disparition. Cette pollution a des conséquences directes pour les humains. Prenons l’exemple de  Minamata, ville côtière du Japon, où une usine de métaux s’est installée en 1932. En 1950, des journalistes révèlent que de nombreux habitants sont malades. Il faut pourtant attendre 1968 pour que les rejets toxiques dans la mer soient arrêtés. Mais la pollution maritime résiduelle tuait 175 personnes, sept plus tard, en 1975.

Quelques dictons maritimes

« Trop fort n’a jamais manqué » : ce dicton rappelle qu’il faut garder de la ressource et ne pas lésiner sur sa peine.

« Un marin salue le grain » : rappelle un geste de courtoisie d’antan, quand on découvrait  son couvre-chef pour saluer un quidam. Quand un grain s’approche du navire, le marin réduit la voilure, et s’établit quand le grain est passé.

« Être au vent de sa bouée » : c’est avoir prévu les ennuis et les contretemps

« La vague scélérate » : est un phénomène surprenant qui peut surprendre les marins. Par temps calme se forme parfois une vague de 10 à 15 mètres de haut, tel un mur qui traverse la mer. J’ai moi-même vécu ce phénomène à deux reprises, la première lors d’une traversée entre Dakar et New York, la seconde sur un pétrolier dans le Golfe Persique. Ce phénomène a été mesuré dans les années 50 par l’EDF, qui étudiait la hauteur des vagues et de la houle dans la baie du Mont-Saint-Michel. On le sait peu, mais il existe des vagues de 15 mètres dans ce secteur, et ce environ une fois tous les six mois. Il existe également des vagues scélérates, « des mascarets » qui remontent les fleuves. On connaît le mascaret de la Gironde, qui se forme par grand coefficient de marée.

« La marchandise suit le pavillon » : le pavillon qui flotte à la poupe d’un bateau valait toutes les publicités. Maintenant que l’on trouve des pavillons de complaisance, le pavillon ne représente ni la nationalité du banquier propriétaire du navire, ni celle de l’équipage ou encore celle de l’origine des marchandises.

Les premiers cas de pavillons de complaisance sont apparus au XVIIIe siècle dans les Caraïbes. Pour être tranquilles, les bateaux anglais ou français arboraient un drapeau espagnol. Pendant la Première Guerre Mondiale, le Lusitania, paquebot au pavillon américain (alors neutre), est coulé par les Allemands. Les armateurs américains demandent alors aux autorités l’autorisation d’arborer le pavillon du Panama ou du Liberia (alors sous contrôle américain). Après la guerre, les armateurs se rendent compte qu’en naviguant sous drapeau du Panama ou du Liberia, ils n’ont pas de taxes ni d’impôts à payer. Ils choisissent de rester sous drapeau de complaisance, non plus pour une raison de sécurité mais pour gagner plus d’argent. La complaisance moderne est un phénomène très installé. La France a même inventé le Registre International Français (RIF), sorte de deuxième pavillon national sous lequel les armateurs ont moins de taxes que sous le drapeau national.

En manque de navigants qualifiés

L’Europe et le monde sont confrontés au manque de navigants, et surtout de marins qualifiés. Avec la décolonisation et la diminution de la flotte qui s’ensuivit (de 1 200 navires français à moins de 200 depuis la fin des années 80), on a progressivement incité les anciens à partir. Dans le même temps on disait « ne venez pas » aux jeunes. Maintenant, on cherche du monde en France et en Europe. Avec l’automatisation de nombreuses tâches, on a besoin de moins de marins pour manœuvrer un navire. Un navire français compte une quinzaine de membres d’équipage (contre 45 auparavant), et seulement neuf sur un bateau japonais. Pour le moment, de nombreux navigants sont dangereux, en raison d’un manque de formation et d’une volonté de passer inaperçu. Il faut donc faire savoir à nos jeunes que la marine est un métier très intéressant, plutôt bien payé, sans chômage, avec une condition de vie et de travail bien meilleures que dans le passé. Nos bateaux modernes sont confortables, sûrs, et permettent d’être en relation constante avec ses proches. Les marins alternent vie à bord et temps de congés, à part égale. La France compte douze lycées maritimes et quatre écoles supérieures, qui proposent donc des formations du CAP à Bac+5.

Les leçons de derniers naufrages

Après les naufrages de l’Erika et du Prestige, l’Europe a pensé à installer des ports refuge. C’est au préfet maritime de décider où il faut diriger le navire en difficulté, de sorte à contenir le fléau et éviter une marée noire de grande ampleur. A cet égard, la gestion du Prestige a été une grossière erreur : on avait renvoyé le navire vers la haute mer et quand il a coulé, le pétrole s’échappant de ses cuves a souillé les plages du Portugal à la Vendée.

On sait d’expérience qu’en cas de marée noire, il vaut mieux laisser faire la nature plutôt que de déverser des produits « de dépollution » (qui sont parfois eux-mêmes polluants) chargés d’éliminer les hydrocarbures. En général, mieux vaut laisser faire le temps. Après la catastrophe de l’Amoco Cadiz, la faune et la flore marine se sont régénérées assez vite.

Les Etats-Unis ont imposé que les cargos soient équipés  d’une double coque. On ne le sait pas assez : cette structure est garantie pour manœuvrer à 3,5 nœuds alors qu’un porte-conteneur navigue à 20-25 nœuds. En cas d’abordage franc, cette double coque n’est d’aucune utilité. De plus, il est très difficile de contrôler ce qui se passe entre les deux coques. Le remplacement des bateaux à simple coque par des navires à double coque n’a pas sécurisé pour autant la navigation sur l’ensemble du globe, les anciens bateaux ayant été renvoyés dans le Tiers-Monde.

Autre source de pollution : la terre. On l’a bien remarqué sur l’îlot français de Clipperton (zone de pêche exclusive) qui est constamment souillé par des objets venus du Mexique, à 1 200 kilomètres de là.

En savoir plus …

Coté Web :

http://www.adhe.asso.fr/Activites/ReneCayeux.asp

http://www.officedelamer.com/annuaire/index.php?catID=49

http://www.metiersdelamer.com/

http://www.marinerecrute.gouv.fr/

http://www.csmm.equipement.gouv.fr/IMG/pdf/annexe1_cle2effd4.pdf

http://ifm.free.fr/htmlpages/index1.htm

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